Publié le 02/03/2021 - 4 minutes de lecture

Dimanche 3 mars 1991, je prépare le petit déjeuner. Le café embaume la petite cuisine en attendant le retour de ma douce amie de l’époque qui a eu la gentillesse d’aller acheter des croissants, du pain frais et le journal local. À son retour elle pause la baguette, le petit sachet en papier contenant 2 croissants et le journal plié en deux. Mes yeux se portent machinalement sur ce dernier, et là… c’est le choc, je deviens blême et je déplie sèchement “Le Progrès”. Le titre me confirme ce que j’avais cru entrevoir :  « Gainsbourg est mort”.

Oh non ! Tu as vu ça ? Dis-je à ma belle. Putain, non pas lui !

Mes yeux parcourent plusieurs fois le titre sans y croire, en espérant innocemment que ce n’est pas vrai, que c’est un cauchemar… Mais non, le grand Serge est bien mort le samedi 2 mars 1991… J’ai mal à ma culture, j’ai mal au cœur, j’ai mal au ventre comme si j’avais perdu un proche. Finalement, Gainsbourg était un proche à sa façon, enfin plutôt à ma façon, puisque je l’écoutais quasiment tous les jours.

Souvent incompris, j’ai toujours aimé cet artiste, cet écorché vif, poète émotif et provocateur, compositeur-interprète de génie, qui a marqué la chanson française pour toujours et à jamais. Du “Chant à la une !” (1958) qui contient son fameux “Poinçonneur des Lilas » à « You’re under arrest » (1987), j’ai tout écouté et tout aimé de lui… C’est Boris Vian (son grand frère spirituel) qui a donné envie à Gainsbourg de se lancer dans la chanson, après une carrière de peintre raté, selon lui. Vian écrira dans le Canard enchaîné en 1958 « Allez, lecteurs ou auditeurs toujours prêts à brailler CONTRE, contre les fausses chansons et les faux de la chanson, tirez deux sacs de vos fouilles et raquez au disquaire en lui demandant le premier album d’un drôle d’individu nommé Gainsbourg Serge”.

Puis viendra « La Javanaise » écrite pour Juliette Gréco en 1963 et puis « Poupée de cire, poupée de son » chantée par la jeune France Gall à l’Eurovision de 1964, qu’elle remporte. Tournant décisif dans la carrière de ce dandy pop qui à partir de ce moment là écrira de très nombreux tubes pour d’autres femmes : Bardot, Birkin, Karina, Adjani, Deneuve, Paradis, Bambou, etc. Et tous ces albums précurseurs et magnifiques (Melody Nelon, Bonnie & Clyde, Vu de l’extérieur, Aux armes et caetera, Love on the beat, etc.). Bon, je ne vais pas vous raconter la vie et la carrière de cet artiste majeur qui fait l’actualité en cette période anniversaire… Je vais plutôt vous confesser ma rencontre avec cet homme dont l’œuvre inspire encore de nombreux artistes en France et ailleurs !

En effet, j’ai eu la chance et le privilège de le voir sur scène, pour ce qui allait être sa dernière tournée « You’re under arrest« . Oui, j’ai eu le plaisir de voir Gainsbourg en chair et en jeans le 7 mai 1988 au palais des spectacles de Saint-Étienne… Quelle soirée ! Je revois encore les fans lancer sur scène des paquets de Gitanes, comme on lance des fleurs… Je me souviens du moment où nous chantions tous en cœur “La Javanaise”. Je me souviens de la classe et du charisme de l’artiste. Je me souviens de la qualité des musiciens et des arrangements. Je me souviens de cet homme qui aimait et respectait son public et ses musiciens. Finalement, bien différent de l’image du Gainsbarre médiatique. D’ailleurs ne disait-il pas :  “Quand Gainsbarre se bourre, Gainsbourg se barre« . D’écrire ces mots me donne encore des frissons 33 ans plus tard. Je n’oublierai jamais ce concert et cet homme que j’écoute encore, encore et pour toujours.

Chez moi trône la célèbre photo de Brassens, Brel et Ferré, et parfois je demande à mes amis : tu rajouterais qui s’il fallait mettre un quatrième larron sur cette photo. Certains me répondent Ferrat, Aznavour, Higelin, Nougaro, Trenet, Cabrel, Jonasz…

Pour moi, ce serait Gainsbourg, c’est sur ! Et vous ?

Au fait, je n’en ai jamais voulu à ma petite amie de l’époque de m’avoir « apporté cette mauvaise nouvelle des étoiles« , puisque je l’ai épousée depuis et que ça fait 30 ans qu’on écoute du Gainsbourg ensemble. Car, comme disait l’Homme à la tête de choux : “la vie ne vaut d’être vécue sans amour”.

Voici la playlist hommage à Gainsbourg offerte by Deverjac

Love&Gainsbourg

Deverjac

 

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