Publié le 24/02/2020 - 5 minutes de lecture

Chaque mois, je vous propose de découvrir l’origine et le sens de certaines expressions ou mots étranges encore courants dans notre vocabulaire. Arts de la table, commerce, justice, finance, architecture, monde animal, militaire et monde du jeu, autant d’univers qui ont forgé de nombreuses expressions, utilisées aujourd’hui de manière parfois totalement décalée de leur sens d’origine !

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Février : « s’offrir à bouche que veux-tu »… (2/2)

Attention ! Chronique NSFW !

Mois de la St Valentin, février est court (voir notre chronique de janvier). Le froid poussera les plus hardis coquins à se réchauffer en prenant leur pied ! Le soupirant amoureux, aux trousses de sa belle, retient son souffle : Qu’elle lui donne du grain à moudre, et c’est en sifflotant « il court il court le furet», qu’il l’entraînera dans sa couche pour qu’elle passe sur le billard.

En ce mois de février, je vous propose 5 formules célèbres qui ont toutes un rapport avec l’acte charnel, le geste tendre, la symphonie des plaisirs, les tribulations du polisson, l’art de la gaudriole… bref, le sexe !

Février « s’offrir à bouche que veux-tu » 1/2 par ici.

Passer sur le billard

Dès son invention au Moyen Age, le billard, inventé par les chantres de l’amour courtois, les troubadours, est tendancieux : désignant au départ la queue seule, il donne ensuite son nom au jeu en lui même. Les sous-entendus graveleux n’ont par tardé à surgir dans le vocabulaire courant : faire une partie de billard, c’est faire l’amour ; occuper le billard, c’est dormir ensemble.

C’est pendant la Première Guerre mondiale que le mot perd son sens érotique : Monter sur le billard, en 1915, c’est sortir de la tranchée pendant l’assaut. Y a-t-on vu une réminiscence du jeu de billard du Moyen Age, qui se pratiquait alors dehors, sur terrain plat (par mimétisme, le no-man’s land entre les deux camps), ou au lit, car à la guerre comme dans le lit, on finit couché ? En tout état de cause, en 1916, le billard en vient à désigner la table d’opération chirurgicale. L’antiphrase alors utilisée démontre un sens de l’humour grinçant : on est passé du billard comme lit – pour y jouir – au billard comme table d’opération – pour en baver.

« Il court, il court, le furet… »

Ah si enfants, nous avions su le sens exact de cette chanson ! Toute innocente qu’elle paraît, la comptine ne raconte pas la fuite du cousin de la belette mais s’avère être une contrepèterie ! Vous l’avez ? Reprenons la première strophe, la plus connue :

Il court, il court, le furet
Le furet du bois, mesdames,
Il court, il court, le furet
Le furet du bois joli.

En contrepèterie, cela donne :

« Il fourre, il fourre, le curé,
Le curé Dubois, mesdames,
Il fourre, il fourre, le curé,
le curé Dubois joli. »

La chanson a été créée entre 1715 et 1720. Petit retour sur l’histoire de France : Louis XIV (1638-1715), à son décès, laisse le royaume de France à son arrière petit-fils, le futur Louis XV, seul descendant du Roi-Soleil encore en vie. Le jeune roi a 5 ans. En attendant qu’il atteigne la majorité royale (à 13 ans), on confie la régence à l’un de ses cousins, Philippe d’Orléans (1674-1723). Réformateur, il redresse le pays épuisé par 14 ans de Guerre d’Espagne et conclut la paix. Mais il est surtout célèbre pour sa débauche légendaire. Il organisait notamment « les petits soupers », qui finissaient souvent en orgies. A ces dîners, participait son principal ministre, l’Abbé Dubois, dont les mœurs prétendument dissolues lui valurent, dans les rues de Paris, des moqueries. La chanson est née de ces rumeurs, où l’on accusait le Régent et l’Abbé Dubois de frivolités telles qu’elles entraînaient, croyait-on, le royaume dans des cataclysmes (crise financière, incendies, peste de Marseille en 1720…).

Bonus

Savez-vous que l’orgasme féminin a longtemps été ignoré, méprisé et même totalement inconnu de la science ? C’est en 1859 que le médecin Jules Guyot (1807-1872) écrit son Bréviaire de l’amour expérimental. Il s’intéresse notamment au plaisir féminin, au clitoris et à l’orgasme, qu’il appelle le spasme génésique, c’est à dire une « contraction musculaire brusque et involontaire, des mouvements convulsifs et inarrêtables du corps humain. »

Ainsi, au lieu de dire : « ce plat cuisiné est jouissif ! », sortez votre science : évoquez plutôt « un spasme génésique gustatif » !

Le mois prochain, élections municipales oblige, on se penchera sur la taille, les participations, les échanges… bref les impôts et les commerces locaux !

La suite dans deux semaines ! Restez connectés !

Sources : 

> Alain REY, 200 drôles d’expressions que l’on utilise tous les jours sans vraiment les connaître, 2015.

> Agnès PIERRON, 200 drôles d’expressions érotiques que l’on utilise tous les jours sans le savoir, 2016.

> Le spasme génétique

GOUPIL(e) LE BON MOT

Goupil(e) le bon mot a rédigé cet article.

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