Publié le 16/12/2019 - 4 minutes de lecture

Chaque mois, je vous propose de découvrir l’origine et le sens de certaines expressions ou mots étranges encore courants dans notre vocabulaire. Arts de la table, commerce, justice, finance, architecture, monde animal, militaire et monde du jeu, autant d’univers qui ont forgé de nombreuses expressions, utilisées aujourd’hui de manière parfois totalement décalée de leur sens d’origine !

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Décembre : Tous à table ! (2/2)

Ah décembre ! Le mois des agapes, des retrouvailles en famille et des repas qui tirent en longueur : Une fois la table dressée, les convives se mettent à converser : c’est le moment de resserrer les liens, de faire copain-copain avec son voisin de tablée, et finir confidents d’un soir, entre la poire et le fromage. Attention cependant à ne pas dépasser le couvre-feu et ne pas rater son dernier bus, car s’il fait bien mauvais, on risque fort d’être trempé comme une soupe !

Entre la poire et le fromage

Littéralement : « vers la fin du repas », utilisé aussi pour dire « entre deux évènements ». La poire évoquée ici est bien le fruit, pas le digestif de tonton Michel fait maison et distillé à 45° ! L’expression renvoie à une habitude culinaire bien ancrée dans notre pays depuis le Moyen Age, celui de commencer le repas avec le fruit par excellence, et très répandu en France : la poire. Puis venaient, chez les plus aisés évidemment, les potages, les rôtis, les volailles et l’on terminait le festin par le fromage. Mais tout changea au XVIIe siècle : imitant le déroulement du repas des Bataves, ancien nom des Néerlandais, avec qui ils partageaient les repas de trêve lors des innombrables guerres entre nos deux pays, les nobles militaires amenèrent cette tradition à la Cour du roi de France : les fruits furent désormais consommés en dernier, ce qui fausse aujourd’hui encore notre compréhension de l’expression.

Couvre-feu

À la fin du repas, les servantes de la maisonnée (château, hôtel particulier) rangeaient la table, rassemblaient les braises dans la cheminée des cuisines et les couvraient d’un plat à larges bords. Il fallait éviter à tout prix les départs involontaires de feu dans les grandes demeures de pierres soumises à de perpétuels courants d’air. Si les braises étaient oubliées, le garde de faction pouvait exiger le couvre-feu, c’est à dire la protection du foyer. Le temps passant, la formule a désigné l’heure tardive à parti de laquelle plus aucun feu ne pouvait être allumé, donc l’heure à partir de laquelle toute activité humaine doit cesser.

Être trempé comme une soupe

Et confondre le contenant du contenu ! En effet, pendant très longtemps, la soupe en question ici, du latin Supinus, « couché sur le dos », a désigné la tranche de pain qu’on allongeait au fond de la soupière et sur laquelle on versait le potage. « La soupe était donc coupée en tranche, indique Alain Rey dans son ouvrage (on disait ‘tailler des soupes’) pour être trempée ». Les italiens ont d’ailleurs gardé ce sens quand ils cuisinent la zuppa inglese (« soupe anglaise »), qui n’est autre qu’un gâteau !

Comme je suis d’une nature généreuse, je vous ai concocté un petit cadeau pour vous permettre de faire les fiers à table pendant les fêtes, en épatant votre entourage avec les expressions de ces derniers mois en version… illustrée ! C’est à télécharger juste ici.

Sources : Alain REY, 200 drôles d’expressions que l’on utilise tous les jours sans vraiment les connaître, 2015.

 

Bonne fête de fin d’année !

GOUPIL(e) LE BON MOT

 

Goupil(e) le bon mot a rédigé cet article.

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